C’était notre deuxième voyage consacré au café en Tanzanie. Alors qu’il y a deux ans, nous avions cherché du café dans le nord, au pied du Kilimandjaro, dans la région d’Arusha (Ngorongoro), nous avons cette fois visité la région de Mbeya, dans le sud-ouest. Notre destination : la plantation de café Itende, dont nous avions déjà obtenu et torréfié du café des années auparavant.
Brève histoire du café en Tanzanie
En 1898, des missionnaires catholiques ont planté les premiers caféiers dans la région du Kilimandjaro. En 1919, le commissaire de district britannique a autorisé tous les tanzanien·nes à cultiver du café. Après la Première Guerre mondiale, les britanniques ont planté plus de 10 millions de caféiers dans le cadre d’un programme de promotion du café. La première coopérative de café d’Afrique a été fondée en Tanzanie en 1933. Lorsque les prix du café ont chuté entre 1980 et 1990, de nombreux caféiculteurs et caféicultrices ont abandonné leurs plantations. En 1997, le gouvernement a lancé une campagne pour relancer l’industrie du café et c’est ainsi que plus de 24 millions d’arbres ont été plantés.
Carnet de voyage (Christian Forrer) :
Kurt et moi avons visité les bureaux du marchand de café Tayler Winch dans le quartier du port de Dar es Salaam (Dar) en compagnie de Michael, un torréfacteur de café originaire du Cap, que nous connaissions depuis notre séjour en Afrique du Sud. L’entreprise appartient au troisième plus grand marchand de café du monde : Volcafe de Winterthur. Jeremy, le directeur de l’usine de Dar, nous a fait visiter les entrepôts et nous a décrit l’industrie locale du café. J’ai pu voir l’endroit où nos sacs de café Blackburn Estate ont été bloqués il y a plus de trois mois en raison de problèmes liés à la paperasserie !
Cette fois-ci, notre regard s’est tourné vers une région de café dans le sud-ouest de la Tanzanie : Mbeya. Nous avons été aimablement invité·es à une dégustation de cafés de cette région. Les cafés tendaient vers des notes d’agrumes.
Nous avons passé les jours suivants dans les environs de Mbeya et avons visité différentes plantations et coopératives. Malgré la grave sécheresse qui sévit dans la région, les parties irriguées des exploitations étaient déjà en fleurs. Je n’avais jamais connu une telle splendeur auparavant. Les plants de café avaient l’air d’être fraîchement recouverts de neige. Les fleurs de caféiers dégageaient un merveilleux parfum de jasmin.
La visite d’Itende, un projet dont nous avions obtenu un excellent café il y a un an, a été décevante mais instructive. La ferme, qui est gérée par l’armée, a un bon programme : environ 2000 jeunes issus de la population rurale y suivent une formation d’une durée d’un à deux ans, au cours de laquelle ils et elles apprennent différentes disciplines agricoles : la culture du café, l’élevage d’animaux, la culture du maïs, etc. L’accent est mis sur la discipline, la persévérance et l’entraînement physique. Un camp d’entraînement, en quelque sorte ! Lorsque nous avons parlé du café, il est apparu clairement qu’Itende semble être très opportuniste. Comme la culture du café est devenue assez difficile ces dernières années en raison du faible prix du café et de la sécheresse, le chef de l’armée en charge a même envisagé d’arracher ses plants de café et de les remplacer par une « culture de rente » comme le maïs. Comme pour dire « Si vous ne payez rien, nous en ferons autre chose » Je n’ai pas approuvé cette attitude. Malheureusement, Itende ne me semble pas être le genre d’entreprise avec laquelle nous pouvons construire notre vision de création de partenariats à long terme. La livraison du café d’une année à l’autre serait très incertaine.
De cette visite nous avons tiré une leçon précieuse : ce qui, sur le papier depuis chez soi, ressemble à un projet vitrine peut prendre de toutes autres apparences au moment de se confronter à la réalité sur place. Il est très important de visiter l’endroit d’où provient le café que nous torréfions et vendons, et d’apprendre à connaître individuellement les personnes qui se cachent derrière le café.
Contrairement à Itende, nous avons également rencontré des agriculteurs et agricultrices très intéressées à Mbeya, avec qui il nous semble possible de former le type de partenariat que nous aspirons à mettre en place. De tels contrastes m’intriguent.