À LA RECHERCHE DE LIENS PERSONNELS AVEC LES PRODUCTEURS ET PRODUCTRICES DE CAFÉ

Contrastes
Tandis que la machine à expresso émet de la vapeur et de la mousse au Münsterhof de Zurich et que les passant·es affairé·es se réjouissent de savourer un café bien chaud, Oscar Hernandez, à Pitalito, en Colombie, pense à l’état actuel de ses plants : la récolte principale approche et la pluie de ces derniers jours a permis aux cerises de café de pousser de confortablement sous une forme bien charnue. Si la nature continue à jouer le jeu, la récolte dépassera les attentes d’Oscar.
Ces deux scènes ne pourraient pas être plus différentes l’une de l’autre. Et pourtant, notre fascination commune pour le café, nos liens personnels, ainsi que notre confiance mutuelle nous unissent. Nous prenons mutuellement soin de notre relation qui vient de fêter son troisième anniversaire.
Trois étapes clés
La conception d’un nouveau café passe immanquablement par trois étapes : tout d’abord, nous identifions un café que nous aimons toutes et tous et qui peut être préparé en grande quantité dans les bars à expresso. Nous discutons ensuite de la manière d’aborder ce nouveau produit. Quels sont les aspects sur lesquels nous voulons mettre l’accent lors de la torréfaction ? Quels sont les délais à respecter pour que le produit puisse être infusé à temps ? Enfin, nous nous intéressons à l’origine du café. Après avoir examiné et goûté différents échantillons de café vert, nous commençons à planifier un voyage dans le pays d’origine : nous voulons faire la connaissance des personnes qui se cachent derrière le café que nous avons tant aimé en Suisse. Car les faits ne suffisent pas en eux-mêmes à établir un partenariat : une bonne intuition est également nécessaire. Ce n’est que lorsque les deux parties sont convaincues du potentiel commun que nous pouvons nous mettre d’accord sur le prix sans intermédiaire.C’est ainsi que nous formons des partenariats à long terme.

En quoi ces liens sont-t-ils irremplaçables ?
Qu’est-ce qui nous anime ? Tout d’abord, notre curiosité. Cela commence par la qualité du café. En analysant les grains, on peut tirer certaines conclusions sur les conditions locales. On peut par exemple juger si les cerises de café ont reçu suffisamment de nutriments. Le café vert nous informe également sur l’application avec laquelle le travail à la ferme a été fait : si les grains présentent de petites fissures, c’est probablement parce que la machine à dépulper le café n’a pas été correctement calibrée. À cela s’ajoutent de nombreux facteurs qui échappent à cette étape d’analyse du café vert : le facteur humain, par exemple. Comment les personnes interagissent-elles les unes avec les autres dans la plantation de café ? Sont-elles respectueux de la flore et de la faune sur le domaine de la ferme ? Manifestent-elles un intérêt pour partager des connaissances à long terme avec nous et les autres fermes qui collaborent avec nous ? Ces questions sont nombreuses et leurs réponses ne se révéleront que sur place.
Grâce à des négociations de prix en tête-à-tête, sans intermédiaire, nous pouvons garantir que les prix restent relativement stables au fil des ans. Cela donne aux agriculteurs et agricultrices une sécurité de planification et ouvre la porte à des investissements à long terme dans l’exploitation agricole. C’est particulièrement important en cette période actuelle marquée par la volatilité et des prix relativement bas sur le marché mondial du café.
Notre proximité avec les agriculteurs et agricultrices nous permet aussi de mieux comprendre les conditions locales et les développements au-delà des plantations de café. Au tournant d’une discussion engagée avec les exportateurs et exportatrices, nous ouvrons les yeux notamment sur les efforts déployés au Kenya pour supprimer les agent·es de commercialisation, pour ne citer qu’un exemple du marché du café en Afrique de l’Est. Un tel changement au sein des structures du marché local aurait un impact décisif sur nos partenaires locaux et, par conséquent, sur la manière dont nous pouvons acheter du café au Kenya.

Des relations que nous construisons
Nous souhaitons établir des relations stables, fondées sur l’honnêteté et la transparence. Des liens personnels entre entrepreneurs et entrepreneuses, dont les deux parties assument la responsabilité de leurs actes respectifs. C’est la condition sine qua non pour atteindre des objectifs communs à long terme.
Revenons à Oscar en Colombie : lorsque nous lui avons rendu visite cette année, il était assis sur son moulin humide, et c’est là que nous avons réalisé que Los Nogales avait un grand besoin d’humus riche en nutriments. La ferme s’étend sur un terrain escarpée et pour réduire l’utilisation d’engrais, Oscar doit mettre en place une gestion minutieuse du sol existant. C’est ainsi qu’est né le projet commun de construire une installation de compostage produisant la biomasse nécessaire sur plusieurs terrasses. Quelques semaines après notre retour, Oscar nous donne de ses nouvelles sur WhatsApp depuis la Colombie : il nous montre sa nouvelle installation de compostage. Cela a si bien fonctionné qu’il a commencé à acheter des déchets verts à son voisinage.
Aujourd’hui, nous bénéficions toutes et tous d’une nouvelle installation de compostage dans le sud de la Colombie et d’une amitié précieuse entre Oscar et ViCAFE.